lundi 1 avril 2024

La légende de la dame de la Coudoulière

Un peu d'histoire locale.

Nous sommes en l’an 713. Deux ans plus tôt, les Sarrasins qui étaient entrés en Espagne, franchissent les Pyrénées et pénètrent en Gaule où ils sont battus en 732 ou 733 près de Poitiers par les Francs de Charles Martel. À la suite de cette défaite, les Sarrasins, appelés aussi Maures, refluent vers le sud et occupent Narbonne. Ils en seront chassés par le même Charles Martel vers l’an 736 ou 737.

Ils fuirent alors vers l’est pour finalement s’établir en basse Provence. Ils s’installent à la Garde-Freinet, au cœur du massif des Maures, qui devint leur principal repaire. De là, ils répandirent la terreur dans toute la région. Ils n’en seront définitivement expulsés que vers la fin du Xe siècle par Guillaume Ier dit le Libérateur, comte et marquis de Provence, secondé de vaillants chevaliers provençaux.

Depuis la plate-forme du château médiéval de Six-Fours, bâti sur un sommet rocheux, nos aïeux pouvaient observer ce grandiose panorama allant du Bec de l’Aigle aux îles d’Hyères.

C’est de ce poste incomparable que les vigies du castrum remarquaient tous les mouvements suspects se produisant dans les baies et anses de la côte. C’est aussi de là que le 1er jour d’août de l’an 950, elles donnèrent l’alarme aux habitants du bourg quand les Sarrasins ayant débarqué à la plage de la Gardiole, proche du Brusc, voulurent atteindre le castrum de Six-Fours non sans avoir pillé au passage les bastides de la plaine.

Prévenue à temps, la population organisa sa défense et rencontra les pillards au lieu-dit de Malogineste. Se portant au-devant des barbaresques, les villageois armés seulement d'outils agricoles, infligèrent à leurs adversaires une solide correction et les repoussèrent jusqu'à leurs embarcations, laissant à terre de nombreuses victimes et fait prisonniers ceux qui n’avaient pu fuir.

Au bord même de la route du Brusc, à l’endroit approximatif du combat, un oratoire fut édifié en l’honneur de Saint-Pierre l’année même de l’évènement.

Oratoire commémoratif de la Malogineste

C‘est aussi le 1er jour d’août de l’an 950 qu’un pêcheur du Brusc, ayant eu vent que les Sarrasins allaient débarquer à la plage de Bonne Grâce, partit aux Lônes par la mer pour chercher sa sœur veuve depuis peu et sa nièce âgée de 2 ans, afin de les mettre à l’abri. Sur le retour, après avoir franchi la pointe Nègre, ils rencontrèrent les bateaux des pirates barbaresques qui se dirigeaient vers la Gardiole. Pour leur échapper la frêle embarcation mit les voiles vers la plage de galets de la Coudoulière, se rapprochant des Roches Brunes escarpées où malheureusement elle se fracassa.

On sait que la fillette prénommée Jeanne échappa à la noyade, et que sa mère périt dans le naufrage. Jeanne fut élevée dans la foi catholique par son oncle pêcheur et sa tante poissonnière au Brusc. Lorsqu’elle eut 16 ans, la miraculée orpheline se rendit chaque année, le 1er jour du mois d’août, en pèlerinage près des lieux où sa mère mourut pour y déposer une brassée de lys blancs qu’elle cultivait dans son petit jardin. Ce cérémonial dura jusqu’à sa mort, à un âge très reculé.

Les villageois la décrivait comme étant une belle jeune femme aux yeux bleus, aux cheveux châtains et longs qui retombaient en ondulant sur une robe de lin jaune rehaussée de fils dorés, comme le montre le vitrail ci-après reconstitué en 1882 à partir d’un dessin monochrome du vitrail d’origine. 

Portion de vitrail de N-D de la Coudoulière

Jeanne était très pieuse, affable et charitable. On ne lui connaissait aucun soupirant malgré son extrême beauté.

Au fil du temps elle devint une vieille dame digne, toujours vêtue d’une robe de lin de couleur jaune, couleur qu’elle aimait porter. Elle inspirait respect et admiration car malgré son peu de fortune, elle était d’une grande bonté et aidait les indigents dans le besoin. Les gens du village l’appelaient tout simplement « la dame de la Coudoulière ».

Quand Jeanne mourut en 1040, ils recouvrirent son cercueil de lys de la Madone dont la fragrance mystérieuse, à la fois suave et florale, embauma pendant plusieurs jours le petit cimetière attenant à la chapelle où elle fut inhumée.

Le temps passant, son souvenir tomba progressivement dans l’oubli jusqu’en 1988, date à laquelle fut inauguré le parc de la Méditerranée par M. Estève, maire de Six-fours. Des membres d’une association provençale qui avaient eu vent de la légende de la Dame de la Coudoulière, entreprirent d’entretenir sa mémoire, malgré qu’elle ne fut pas sanctifiée, et firent construire face à l’entrée du parc municipal un oratoire pour l’honorer.

Cet ouradou, érigé par les "Leis Amics de Coudouliero", se trouve sur la corniche de la Coudoulière et n’est accessible que par un groupe de personnes initiées dont je fais partie.

L'oratoire de N-D de la Coudoulière

Nul besoin de chercher !

Vous ne trouverez pas cet oratoire car il n’a existé, un bref instant, que dans l’imagination du Blogger de la Coudoulière un jour de 1er avril… mais en cherchant bien, vous apercevrez au dit lieu, dans un mur en pierres, une niche à partir de laquelle a germé l’idée de ce montage photographique et du récit s’y rattachant !

 



Cartes et photos du premier avril à télécharger sur le site de COUDOULIERE.FR .

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